dimanche 26 avril 2015

Les ivoires magiques


Ivoire magique des Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles (Inv. E.2673)

Objets connus sous les noms de « ivoires magiques », « bâtons de jet », bâtons magiques », ou atropaïa (objets possédants une protection magique).  Ils se présentent comme des croissants assez plats (longueur souvent supérieure à 50 cm) et étaient fabriqués à partir de canines inférieures d’hippopotames. Il en existe aussi des exemplaires en bois et en faïence.

Le côté supérieur est légèrement bombé tandis que le côté inférieur est plat. Au recto, sont représenté des divinités et génies protecteurs ainsi que diverses inscriptions.

Ils sont sollicités dans un rôle de protection et sont assimilés aux événements mythologiques dans lesquels ils ont été impliqués ou ont joué un rôle bénéfique. Un rôle semblable est attendu pour les personnes à qui ils sont donc destinés.Les bénéficiaires de ces protections sont généralement des enfants ou des femmes.

Les objets de ce types les plus anciennement retrouvés datent du Moyen empire mais on en a retrouvé plusieurs dans des tombes datant du Nouvel Empire. On soupçonne leur origine mésopotamienne ou syro-palestinienne mais sans aucune preuve actuellement.

 Les principales représentations

Celles-ci sont gravées dans la partie supérieure de l’objet et représentent généralement des êtres fantastiques ou des personnages à l’allure grotesque. Ils sont tous les émissaires des puissances redoutables qui nichent dans le désert et dans les eaux. Leur pouvoir, à l’origine hostile pour les hommes, est contrôlé et retourné contre le milieu dont il est issu.

Parmi celles-ci on peut noter le plus fréquemment la présence de :
Griffon : animal légendaire réputé pour vivre dans le désert. C’est un animal composite : corps de lion à la queue recourbée muni d’une tête de faucon. De ses flanc surgissent deux ailes déployées en éventail qui s’ornent en leur milieu d’une tête humaine. Des serpents accompagnent souvent les griffons. 
Génie appelé Aha (le Combattant)
Représenté sous forme d’un humain difforme à tête de vieillard (forme ancestrale de Bès). Représenté de face, il porte une crinière qui laisse apparaître ses oreilles de félidés. Il présente un corps décharné et une ventre ballonné. Sa queue large descend jusqu’au sol. Ses genoux sont pliés et forment un angle. Aha tient un serpent dans chaque main. Ses parties génitales sont souvent bien mises en évidence. Une contrepartie féminine l’accompagne parfois. 
La divinité léonine
Elle porte une crinière assez courte et bloque dans ses pattes antérieures un serpent qu’elle tient entre ses dents. 
La divinité hippopotame
Debout sur ses pattes arrières, elle présente un ventre gonflé et des mamelles pendantes (à l’instar de la déesse Taouret). Dans ses pattes antérieures, elle tient différents signes de protection (la croix de vie ankh par exemple). Sa tête et son dos se couvrent d’une crête en forme de crocodile. Sa gueule est celle d’un hippopotame encadrée par une crinière de lion. L’animal montre les dents et tire la langue. 
La panthère à cou de serpent
Attestée déjà sur les palettes de l’époque prédynastique, l’animal se présente comme un félidé au très long cou portant une tête de panthère.
Parmi les nombreuses autres représentations, qui changent en fonction du panthéon local, citons le lion double à face humaine, le disque solaire muni de deux jambes, la tête de chacal, le cynocéphale portant un œil, le serpent à tête humaine, tortues, etc.

Les inscriptions

Les divinités ou les génies protecteurs sont parfois accompagnés de courtes inscriptions confirmant l’aspect protecteur de l’objet : « protection de nuit et protection de jour », « protection autour d’elle chaque jour » ou encore « je suis venu pour protéger Untel ». Parfois, certaines sont un peu plus précises : « coupe la tête de l’ennemi mâle et de l’ennemi femelle qui entre dans la chambre des enfants nés de Untel ».

Utilisations des ivoires magiques

Son utilisation devait certainement s’accompagner de récitations de formules magiques, mais ce rituel oral nous fait évidemment défaut. Le rituel de protection est encore une fois de plus celui du transfert : on assimile la situation de la personne à protéger avec celui de la divinité dans une situation donnée.

Il est difficile de savoir si ces ivoires magiques étaient utilisées dans un contexte curatif (agression déjà perpétuée) ou dans un contexte préventif (protection vis-à-vis d’agressions éventuelles). Les hypothèses penchent plutôt vers le contexte préventif en raison du type de formules inscrites sur les ivoires.

Les ivoires magiques s’inscrivent dans une longue tradition plusieurs fois millénaires. Certaines représentations sont issues de l’époque protodynastiques et ont perdurés jusqu’à l’époque gréco-romaine.

Les enfants devant être particulièrement protégés dans la société égyptienne, il était important de mettre en œuvre toutes les mesures matérielles ou magiques capables d’éviter aux enfants des accidents qui auraient pu mettre leur vie en péril. La venue d’un enfant dans une famille était toujours considérée comme une bénédiction des dieux !


Bénou, le phoenix égyptien

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« Celui qui se lève » telle est la traduction de bénou. En Égypte, celui qui se lève chaque matin pour éclairer le monde n’est autre que Râ. Bénou est donc Râ qui se lève ou plus précisément, le ba de Râ ayant pris la forme d’un héron majestueux.

Bénou est attesté dès l’Ancien Empire, mais à l’époque il ne revêt pas encore le noble aspect du héron mais bien celui d’une bergeronnette, petit oiseau de la famille des passereaux. Plus tardivement, Bénou prendra l’aspect d’un héron cendré (Ardea cinerea) un grand et bel échassier qui affectionne les lieux humides tels les fourrés de papyrus du delta ou ceux poussant sur les berges du fleuve sacré. Lorsqu’il jaillissait de l’eau, son mouvement pouvait rappeler celui de l’astre solaire s’élevant au-dessus de l’horizon. L’association avec Râ fut donc faite en toute évidence. C’est ainsi que l’on retrouve parfois Bénou remplaçant Râ sur la barque solaire, il est alors coiffé du disque solaire ou de la couronne atef qui le lie également avec Osiris.

Plusieurs variantes de la naissance de Râ existent dans la cosmogonie héliopolitaine. Parmi celles-ci, on parle d’un œuf duquel aurait jailli le soleil. Cet œuf primordial, aurait été pondu par le « grand caqueteur » dont le cri déchira la première fois le silence : un oiseau du nom de Bénou. Dans ce mythe, il fut donc le tout premier être à se poser sur la butte primitive, la première terre émergée du Noun, cette butte qui pris le nom de benben.
Cet animal, présent sur terre depuis des temps immémoriaux inspira semble-t-il aux Égyptiens, l’idée d’une exceptionnelle longévité. Selon le mythe, il ressuscite tous les cinq cents ans après une flamboyante mort sur le bûcher de plantes aromatiques qu’allume le dernier rayon du soleil couchant.

Ovide, auteur latin du 1er siècle avant notre ère, écrivit à propos du bénou : « Il ne vit ni de grains ni d’herbe mais des larmes de l’encens et du suc de l’amome. A peine a-t-il accompli les cinq siècles assignés à son existence qu’aussitôt posé sur les rameaux ou la cime oscillante d’un palmier, il construit son nid avec ses serres et son bec, purs de toutes souillures. Là, il amasse de la cannelle, des épis, du nectar odorant, des morceaux de cinnamome, de la myrrhe aux reflets dorés ; par-dessus il se couche et termine ainsi sa vie au milieu des parfums. Alors du corps paternel renaît, dit-on, un petit phénix destiné à revivre le même nombre d’années. Quand l’âge lui a donné assez de forces pour soutenir un fardeau, il décharge du poids de son nid les rameaux du grand arbre, et emporte pieusement son berceau qui est aussi le tombeau de son père. Parvenu à travers les airs légers de la ville d’Héliopolis, il le dépose devant la porte sacrée de son temple. »

Dans le contexte funéraire, le bénou incarne le défunt en devenir car il était considéré comme « le ba issu du cœur d’Osiris ». Ainsi, le chapitre 13 du Livre des Morts nous révèle que le défunt souhaite pouvoir se transformer en « oiseau Bénou » et le chapitre 83 du même corpus, représente le défunt sous les traits d’un héron, au moment de la pesée du cœur devant le tribunal de l’au-delà présidé par Osiris. En fonction du jugement, ce héron (le défunt) pourra prendre ou non son envol et renaître pour une nouvelle vie.

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Bénou représenté dans la tombe de Néfertari (XIXe dynastie)

Outre des amulettes en forme de « bénou » que l’on retrouve principalement sur les momies de la Basse Époque, l’oiseau sacré est représenté dans plusieurs tombes comme dans celle de Senedjem à Deir el-Médineh où le bénou couronné d’une imposante couronne atef, est figuré aux côtés de Rê-Horakhty dans la barque solaire.

Les légendes entourant le Bénou (puis le phénix) ont largement survécus à l’époque pharaonique, ainsi croyait-on à l ‘époque romaine que l’apparition du héron sacré annonçait quelque événement d’importance. L’auteur latin tacide témoigne de ce fait car il rapporte que la mort de l’empereur Tibère (pour qui l’Égypte comptait particulièrement) survenue en 34 ap. J.C. aurait été annoncée par un phénix traversant le ciel !

La déesse du Sycomore


Déesse du Sycomore
Scène provenant du tombeau de Senedjem (TT 1) – XIXe dynastie, Deir el-Médineh)

Senedjem et son épouse Iineferti parcouraient les chemins lumineux de l’au-delà depuis un certain temps déjà. Ils avaient déjà affronté de multiples périls dans la Douat, mais leur route s’annonçait encore bien longue pour atteindre les champs d’Ialou où ils pourraient vivre éternellement dans l’abondance.
Soudain, ils virent dans la lumière se dessiner la silhouette d’un arbre, un grand et majestueux sycomore. Nul part, de leur vie passée dans la vallée du Nil, ils ne virent un tel arbre ! Haut d’une quinzaine de mètres, le sycomore avait un tronc blanchâtre surmonté d’une luxuriante frondaison étalée. Il portait d’innombrables figues amassées en grappes devenant rouges à maturité.
Aussi, intrigués autant que fascinés, ils s’approchèrent respectueusement du sycomore. Lorsqu’ils touchèrent l’écorce qui frissonnait comme animé d’une énergie mystérieuse, une déesse leur apparut, émergeant soudainement du tronc de l’arbre. Elle était d’une incroyable beauté, son corps élancé et gracieux se confondait avec ce majestueux végétal. Une douce lumière et un parfum suave baignait les alentours.
Elle se pencha vers les deux voyageurs de l’au-delà et leur tendit une aiguière contenant l’eau pure et un plateau garni de pains et de gâteaux. Après s’être rafraîchis et rassasiés, Senedjem et Iineferti remercièrent la déesse du sycomore en récitant quelques prières et formules magiques qui leur permirent de poursuivre leur périple sur les beaux chemins de l’Occident.
 Texte de Méryrê

Cette vignette illustre le chapitre 62 du Livre des Morts qui nous enseigne que nous pouvons " boire de l’eau dans la nécropole ". Cette eau pure et vivifiante est celle de la crue annuelle du Nil par laquelle " tous les pères et toutes les mères " reviennent féconder le pays afin qu’il puisse revivre éternellement. Cette eau miraculeuse est contenue dans un vase rituel (hes) dont la déesse du Sycomore se sert pour verser le précieux liquide sur les mains tendues du défunt.

La bienveillance de cette déesse, que l’on assimile généralement à Nout ou parfois à Hathor, fait ainsi référence à son aspect maternel vis-à-vis du voyageur de l’au-delà.

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Sycomore photographié à Assouan (photo : Méryrê, 2001)

Botaniquement, le sycomore est un arbre de la famille des Moraceae dont le nom est Ficus sycomorus. Il est originaire d'Afrique centrale mais est cultivé en Egypte depuis le IIIe millénaire avant notre ère.


Atteindre son étoile


" Je grimperai sur l’espace lumineux,

Je traverserai l’esprit de la terre,

Je cheminerai dans la lumière,

Et j’atteindrai l’étoile. "

Texte des Sarcophages, chapitre 545




" J’ai jubilé car on m’a fait toucher le ciel.

Ma tête a percé le firmament,

J’ai éraflé le ventre des étoiles

et atteint l’allégresse,

de sorte que je brillais comme une étoile,

et dansais comme une constellation. "

Inscription provenant de la tombe de Sarenpout (Assouan)


Le lotus dans l'Egypte ancienne


Il existe en Égypte, deux espèces de "lotus" dont la fleur peut être bleue ou blanche. Le lotus bleu est une plante dont la fleur s‘épanouit le jour tandis que le soir, elle disparaît sous les eaux dont elle ne ressortira que le matin avec les premiers rayons du jour. Le lotus blanc, quant à lui, suit un cycle inverse : il s’ouvre à la tombée de la nuit et se réfugie dans les ondes durant la journée.


L’association du cycle journalier du lotus bleu avec celui de l’astre solaire était tellement évidente aux yeux des anciens Égyptiens que le clergé d’Hermopolis a utilisé cette analogie pour décrire la naissance du monde. Ainsi, selon cette croyance, un lotus en bouton, tous pétales repliés, flottait au premier jour du monde à la surface de l’océan primordial (le noun). La corole s’ouvrit alors et libéra le soleil naissant sous l’aspect d’un jeune enfant. Ainsi aurait commencé le monde et la course inexorable de l’astre dans le ciel. La croyance veut aussi que le soir venu, après avoir achevé sa course, le soleil s’en retourne dans le lotus pour replonger dans l’onde. Le cycle recommence ainsi chaque matin et chaque soir depuis la nuit des temps.

Associé à la régénération de l’astre, le lotus peut porter le nom de néfer, terme évoquant toute idée de perfection, d’accomplissement mais également de rajeunissement et de beauté.

Cette fleur, dont le nom scientifique est Nymphea cerulea était appelé dans les textes mythologiques « plante d’Horbeit » ou « plante senenou ». Elle était réputée détenir des pouvoirs magiques capables de faire fuir les forces du mal et de guérir les morsures de serpents et par conséquent, celle-ci fut utilisée dans plusieurs préparations médicales ou à usage atropaïque.


Bas-relief représentant l’épouse de Ramosé (vizir d’Aménophis III)
XVIIIe dynastie – Thèbes ouest

Le lotus, c’est aussi l’exquise fragrance qui se dégage de sa fleur somptueuse. Celui-ci est fréquemment représenté sur les fresques dans les scènes dite de « banquet » où les convives sont parés de fleurs de lotus dont ils respirent la corolle ou en ornent leur coiffure. L’odeur capiteuse est sans doute en relation, par jeu de mots, avec les facultés sexuelles recouvrées qui symbolisent le retour à la vie du défunt.

Peinture dans la tombe de Sennefer
XVIIIe dynastie – Thèbes ouest


Cette fleur était divinisée sous les traits du dieu Nefetoum « le lotus à la narine de Rê ». Il est l’incarnation du lotus primordial et symbolise le souffle vital qui jaillit de la fleur qui anime toute existence, y compris celle du soleil car il est l’un des réceptacles de la renaissance perpétuelle de l’astre. Dans les monuments funéraires, les défunts cherchent à capter un peu de cette vitalité en respirant l’odorante corolle de nénuphars bleus.

Plante sacrée depuis les temps les plus anciens, le lotus dépeint l’être totalement accompli qui a quitté les profondeurs des eaux obscures pour la pleine clarté de la lumière du jour.


Le complexe funéraire de Djéser (IIIe dynastie)


Pyramide à degrés du roi Djéser
Vue générale de la pyramide à degrés de Djéser 

Le monument le plus célèbre de ce site est le complexe funéraire du roi Djéser (IIIe dynastie). Édifié vers 2.650 avant J.C., il est le plus ancien édifice égyptien construit intégralement en pierres taillées. Toutes les constructions antérieures étaient réalisées principalement en briques crues et en matériaux non durables : la pierre n’était employée que pour certains éléments architecturaux de tombes.

Conçu par Imhotep, vizir et architecte du roi, le complexe funéraire reproduit de manière symbolique le palais du souverain à Memphis. La vaste enceinte rectangulaire, construite de murs à redans de dix mètres de haut, délimite une esplanade de quinze hectares (545 mètres du nord au sud et 277 mètres d’est en ouest). Bien que quatorze portes soient aménagées dans le mur extérieur, une seule donne accès au monument (celle située à l’angle sud-est).

L’entrée débouche sur une allée bordée de quarante colonnes fasciculées ; elles sont les premières de ce type connues en Égypte. Elle servira d’ailleurs de modèle aux salles hypostyles construites ultérieurement. Dans la cour se trouvent un autel de cérémonie ainsi que deux constructions dont la fonction n’est pas encore connue à ce jour.

Chapelles de la cour Hed-Sed et la pyramide

Au nord de la grande cour se dresse la célèbre pyramide à degrés, première pyramide égyptienne considérée comme le plus grand monument de son époque. À l’origine, un mastaba classique fut construit au-dessus d’un puits de 28 mètres de profondeur creusé dans la roche. Au fond de ce dernier, se trouvait la chambre funéraire hermétiquement fermée par un bloc granitique de plus de 3 tonnes. Autour du caveau, plusieurs galeries avaient été creusées pour y contenir le matériel funéraire du souverain. C’est là qu’ont été découverts de splendides faïences bleues (probablement les plus anciennes du monde) et environ quatre mille vases de pierre, dont certains portent les noms de rois ayant précédé Djéser.

Le mastaba d’origine, mesurant 125 mètres sur 109 mètres à la base, fut modifié par la superposition de mastabas de tailles décroissantes, pour former une pyramide à six degrés d’une hauteur de 62 mètres.

Près de l’entrée nord de la pyramide, s’élève le serdab, pièce entièrement fermée, percée de deux petites ouvertures sur le côté principal. Elle contenait une statue grandeur nature du souverain. Réalisée en calcaire peint, elle figure le roi Djéser assis, enveloppé du manteau traditionnel de la fête sed. Elle est la première statue royale de l’Égypte pharaonique. Celle d’origine se trouve actuellement au musée du Caire, mais une réplique a été placée dans le serdab.

Plusieurs autres édifices furent construits à l’intérieur du complexe pour assurer des fonctions symboliques et le culte funéraire du pharaon.



Statuette d'hippopotame


Statuette d'Hipopotamme

  • Numéro d’inventaire : JE 21365 (Musée du Caire)
  • Origine : Nécropole de Dra Aboul Naga
  • Époque : Deuxième période intermédiaire
  • Faïence bleue, hauteur : 11,5 cm, longueur : 21,5 cm
  • Crédit photo : Méryrê


Vivant dans les zones marécageuses et sur les rives du Nil, l’hippopotame avait une double valeur dans la symbolique égyptienne. Sa corpulence, sa férocité, de même que son appétit vorace, en faisait un hôte indésirable que l’on tentait de tenir à l’écart des cultures.

Dès l’Ancien Empire, sur les murs des mastabas, des scènes de chasse à l’hippopotame sont représentées. Celle-ci, met toujours en scène plusieurs personnages qui, debout sur une barque, harponnent le puissant animal. Dans ce contexte, il s’agit d’une intervention magique pour neutraliser l’agressivité des forces du chaos, qui risquent de mettre en péril le devenir du défunt dans l’au-delà. Il fallait donc retenir l’animal hostile au fond des marais, milieu inhospitalier, mais aussi siège des métamorphoses post-mortem.

Au Moyen Empire et jusqu’à la XVIIe dynastie, les tombes contiennent fréquemment de petites figurines d’hippopotame en faïence bleue. Elles sont décorées de plantes aquatiques qui paraissent tisser un réseau végétal sur leurs corps. Il s’agit également d’un artifice magique ayant pour but de neutraliser la puissance incontrôlée du redoutable pachyderme.

La femelle de l’hippopotame est, quant à elle, associée aux images féminines de la fécondité et représente l’incarnation de la déesse Taouret, protectrice de la maternité.

Nous avons donc un exemple typique de la façon dont la symbolique égyptienne utilise une vision bilatérale d’une même force vive de la nature : le mâle de l’hippopotame est le vecteur d’émanations maléfiques et de puissances négatives qu’il faut annihiler, tandis que la femelle incarne une forme favorable, garante de la fertilité.