dimanche 26 avril 2015

La rameuse du lac


Hathor800

Un jour, Snéfrou (IVe dynastie, 2613-2589), en quête de quelques distraction, car il connaissait aussi l’ennui, parcourait lentement toutes les pièces de son palais. Il se promena aussi dans le jardin fleuri et odorant, dont les mille parfums ne le guérirent pas de son ennui.

Alors, il fit venir le prêtre Djadjaemankh et lui conta sa solitude. Le prêtre, un homme de grand savoir, imagina une heureuse diversion à l’ennui royal ; il dit à Pharaon : « Que Ta Majesté se rende auprès de l’étang du palais. Là, tu ordonneras qu’un équipage tout à fait particulier monte à bord d’une barque ; il sera composé de toutes les jeunes et jolies filles de ton harem. Ta Majesté, certes, se divertira tandis que tu les regarderas, en train de ramer de ci, de là, d’un bord à l’autre de l’étang ; tu pourras aussi contempler alentour tous les bonheurs de la nature : les nids qui recèlent une vie ailée encore à venir, parmi les chants et les cris des oiseaux ; tu verras les champs qui s’étendent au loin, où paraissent déjà les jeunes pousses de blé en herbe, d’un vert soyeux et tendre. Le spectacle de toute cette vie, témoin du temps éternellement renouvelé, fera disparaître ta mélancolie du moment. »

Le roi Snéfrou fut aussitôt séduit par cette proposition, commanda : « Que l’on amène vingt rames, faites de bois d’ébène et recouvertes d’or, leurs poignées seront en bois de santal, recouverts également de l’or le plus fin. Que l’on amène aussi vingt femmes, vierges encore, dont les corps seront les plus beaux, la poitrine droite et orgueilleuse et dont la chevelure sera habilement tressée ; qu’elles enlèvent leurs vêtements et s’habillent de résilles légères. »

On agit conformément à tous les ordres qu’avait prononcé Sa Majesté.

Alors le souverain les regarda tandis qu’elles faisaient avancer la grande barque sur l’étang, et son cœur se réjouit de la beauté de la nature et de celle des femmes au corps souple et séduisant.

Soudain, un incident se produisit qui arrêta le lent mouvement des rameuses ; l’une d’entre elles, en voulant tresser une natte à sa chevelure qui s’était dénouée, fit tomber dans l’eau une boucle d’oreille de turquoise à laquelle elle tenait beaucoup. Elle n’accepta pas la proposition du souverain qui voulait lui en donner une semblable ; c’est seulement son cher objet qu’elle souhaitait retrouver.

Pharaon, qui s’amusait de cette histoire, appela à nouveau le prêtre Djadjaemankh et lui conta l’affaire. Celui-ci, également diverti par cet incident léger, et soucieux de plaire au souverain, prononça quelques formules magiques de sa connaissance ; alors l’on pu voir la moitié de l’eau de l’étang se séparer de l’autre et venir recouvrir celle-ci. Djadjaemankh traversa aisément à pied sec une partie de l’étang et retrouva, gisant sur une roche, le bijou convoité.

Il le rendit à sa propriétaire, heureuse et reconnaissante. Puis, en énonçant une autre formule magique, il replaça l’eau de l’étang dans sa position originelle. Et la fête se poursuivit.

Snéfrou, passa alors un jour heureux en compagnie de toute la maison royale et il récompensa le prêtre magicien de toutes sortes de belles et bonnes choses.

Plus tard, Moïse, sur son chemin vers la terre de Canaan, se souviendra, dans le récit de ses aventures, de ce « tour » des magiciens de la vieille Égypte qu’il avait bien connu dans sa jeunesse.

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